IdT – Les idées du théâtre


 

Dédicace

La Mort de Roxane. Tragédie

I.M.S.

Éditeur scientifique : Blondet, Sandrine

Description

Auteur du paratexteI.M.S.

Auteur de la pièceI.M.S.

Titre de la pièceLa Mort de Roxane. Tragédie

Titre du paratexteÀ Monsieur le Président Viole

Genre du texteDédicace

Genre de la pièceTragédie

Date1648

LangueFrançais

ÉditionParis, Augustin Courbé, 1648, in-4°

Éditeur scientifiqueBlondet, Sandrine

Nombre de pages8

Adresse sourcehttp://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71581v

Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/IMS-Roxane-Dedicace.xml

Fichier HTMLhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/html/IMS-Roxane-Dedicace.html

Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/IMS-Roxane-Dedicace.odt

Mise à jour2013-08-06

Mots-clés

Mots-clés français

SujetVérité de l’Histoire contre le roman

Personnage(s)Roxane, veuve d’Alexandre

DédicataireDemande de protection pour l’héroïne ; union de l’héroïne et de l’auteur sous l’égide du même protecteur

RéceptionA priori négatif du public féminin sur le personnage de Roxane ; influence préalable d’une partie du public

AutreÉloge du Président Viole ; La Calprenède et son roman Cassandre

Mots-clés italiens

ArgomentoVerità della storia contro il romanzo

Personaggio(i)Rossana, vedova di Alessandro

Dedicatario e PersonaggioRichiesta di protezione per l’eroina ; unione dell’eroina e dell’autore sotto la stessa protezione

RicezioneA priori negativo del pubblico femminile sul personaggio di Rossana ; influenza precedente di una parte del pubblico

AltriElogio del presidente Viole ; La Calprenède e il suo romanzo Cassandra

Mots-clés espagnols

TemaVerdad de la Historia frente a la novela

Personaje(s)Roxane, viuda de Alexandre

Dedicatario y personajeSolicitud de protección para la heroína ; unión de la heroína y del autor bajo la égida del mismo protector

RecepciónA priori negativo del público femenino para con el personaje de Roxane ; influencia previa de una parte del público

OtrasElogio del Presidente Viole ; La Calprenède y su novela Cassandre

Présentation

Présentation en français

La Mort de Roxane est le premier – et vraisemblablement unique – essai dramatique de cet auteur inconnu, dont les initiales de la signature1 n’ont à notre connaissance pas été décryptées. Le dramaturge commence par évoquer son origine provinciale et l’emploi qu’il occupe auprès de son dédicataire, le Président Viole2, avant de rappeler les malheurs de Roxane, veuve d’Alexandre, dont la postérité avait conservé une image désastreuse essentiellement véhiculée par le Cassandre de La Calprenède (roman de dix volumes publié entre 1642 et 1645). S’ensuit la traditionnelle demande de protection pour la reine, qui fournit à l’auteur l’occasion de dresser l’éloge de son destinataire. Le discours encomiastique prend ainsi le pas sur la présentation de la pièce et de son héroïne : cette évocation ne sert plus que de prétexte à l’habituelle déclinaison des mérites du dédicataire, qui se clôt sur le non moins habituel refus d’en dire davantage de peur d’offenser sa modestie, qualité suprême.

Publiée en 1648, La Mort de Roxane a vraisemblablement été créée au cours de la saison théâtrale 1647-1648, peut-être en concurrence avec Le Mariage d’Oroondate et de Statira de Magnon, tragi-comédie créée à l’Hôtel de Bourgogne et publiée quelques semaines auparavant, qui voyait s’affronter les deux veuves d’Alexandre (Roxane et Statira) et dont le sous-titre, « ou La Conclusion de Cassandre », supportait une allusion analogue au roman de La Calprenède. Mais si l’allusion était alors explicite, I. M. S., pour sa part, ne cite le roman que dans cette dédicace ; de surcroît, il évoque la Cassandre romanesque, sur un mode restrictif qui peut souligner sa distance avec le Cassandre historique – responsable de la mort de Roxane et de son fils – et, par ricochet, l’erreur du romancier. Le dramaturge ne se fait d’ailleurs pas faute de s’attribuer « la vérité de l’Histoire », que l’influence de son dédicataire pourra contribuer à rétablir.

Cette faveur demandée au président Viole suscite enfin l’évocation rapide du public du temps. I. M. S. rappelle la prééminence du jugement des dames, et prend acte des cercles d’influence aptes à faire et défaire les réputations – des reines, héroïnes dramatiques, comme des pièces qui les mettent sur scène et de leurs auteurs.

Texte

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À Monsieur le Président Viole

Monsieur,

[NP1] Je vous offre ce premier essai d’une Muse qui n’a pas pris sa [NP2] naissance sous ce climat ni dans la politesse de la cour. Je sens pourtant en vous l’offrant une confiance qui tiendrait de la vanité si la connaissance des bontés que vous avez pour moi ne la rendait en quelque façon raisonnable. Je la prends de ce que, vous ayant dédié mes plus sérieuses occupations, il me semble que je puis avec quelque justice espérer que vous vous chargerez de la protection de mes jeunesses3. Ce n’est pas sans douleur que la désolée Roxane4 m’entend nommer de la sorte ce que j’ai vou[NP3]lu faire pour elle : elle reconnaît en cela l’opiniâtreté du malheur qui l’a toujours accompagnée depuis son veuvage, de ce malheur, dis-je, qui non content d’avoir abandonné sa vie aux fureurs de l’indigne usurpateur de ses États5, a cruellement persécuté sa mémoire, jusques là6 qu’en France, où les étrangers sont si favorablement traités, il n’y a rien aujourd’hui de si déchiré que la réputation de cette malheureuse princesse. Elle a cette obligation à l’auteur de l’incomparable Cassandre, qui l’a mise en si mauvai[NP4]se odeur parmi nos dames qu’à peine s’en trouvera-t-il une seule, quelque tendresse qu’elle ait d’ailleurs7 pour toutes celles de son sexe, qui ne se défende de donner des larmes au récit de sa mort8. J’ose cependant vous opposer au cours de toutes ses disgrâces, et j’estime votre protection de si grand poids que je pense changer sa destinée, si je puis la lui procurer. Oui, Monsieur, si vous vous déclarez pour elle, vous lui rendrez infailliblement l’éclat qu’elle a toujours eu dans la vérité de l’Histoire, et que le [NP5] roman lui a indignement volé. Daignez dire un mot en sa faveur devant ces illustres personnes9 qui dispensent à leur gré la bonne ou la mauvaise réputation de celles de sa naissance. Il n’en faut pas davantage pour lui faire recouvrer ce qu’elle a perdu d’honneur dans l’estime de ceux qui ne la connaissent que pour la rivale de Cassandre. Mais n’attendez pas qu’elle vous en sollicite : c’est une reine qui n’a pas appris à prier. Aussi n’êtes-vous pas de ceux de qui les faveurs se font acheter par les importunités: au [NP6] contraire, vous obligez avec une générosité qui prévient toujours la prière, et ne souffre jamais le remerciement. La parfaite connaissance que j’ai de cette glorieuse vérité me ferme la bouche pour toutes les autres. Je voudrais (et Roxane même m’en presse), pour témoigner mon ressentiment10 et le sien, dire quelque chose à l’avantage de notre commun protecteur. Je voudrais apprendre à tout le monde que dans la célèbre famille des Viole il y a un homme à qui la France ne doit pas moins qu’à ses illu[NP7]stres prédécesseurs, et qui tous les jours ajoute de nouvelles qualités aux éclatantes vertus qui feront révérer à jamais la mémoire de ses ancêtres. Mais votre modestie usant un peu trop sévèrement du pouvoir que vous ont acquis sur moi une infinité d’obligations me ferme la bouche avec tant d’empire que, n’osant pas vous désobéir de sang-froid, il faut que, pour rompre un silence trop rigoureux pour être longtemps observé, je conjure les Muses qui se plaisent si fort dans votre belle maison des [NP8] champs de m’inspirer cette divine fureur qui ne prend loi que de la vérité, et n’écoute pas les commandements des hommes. C’est elle qui me rendra la liberté de parler, et me mettra en état de secouer le joug que m’impose votre modestie sans perdre le respect que je vous ai voué, comme étant,

Monsieur,

Votre très humble et très obéissant serviteur.

I. M. S.