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Dédicace

Les Coups d’amour et de fortune ou L’Heureux infortuné

Boisrobert, François Le Métel de

Éditeur scientifique : Ding, Ruoting

Description

Auteur du paratexteBoisrobert, François Le Métel de

Auteur de la pièceBoisrobert, François Le Métel de

Titre de la pièceLes Coups d’amour et de fortune ou L’Heureux infortuné

Titre du paratexteÀ Monsieur de Mancini, colonel de la Cavalerie française

Genre du texteDédicace

Genre de la pièceTragi-comédie

Date1656

LangueFrançais

ÉditionParis, Guiillaume de Luyne, 1656, in-12

Éditeur scientifiqueDing, Ruoting

Nombre de pages4

Adresse sourcehttp://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k858706.r=Coups+d%27amour+et+de+fortune.langFR

Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/Boisrobert-Les coups d’amour et de fortune-dédicace-corrigée.xml

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Mise à jour2017-07-19

Mots-clés

Mots-clés français

SourcesCalderon

SujetRéécriture

Relations professionnellesRivalité avec Quinault ; accusation du plagiat

AutreDisgrâce de l’auteur à la cour

Mots-clés italiens

Mots-clés espagnols

Présentation

Présentation en français

Les Coups d’amour et de fortune fut créée pendant la disgrâce de Boisrobert1 et fut l’objet d’une affaire de rivalité avec Quinault qui n’aida pas au rétablissement de la fortune de l’auteur2. La dédicace de cette tragi-comédie manifeste l’importance que le dramaturge accorde à son statut d’auteur en vue, essentiellement appuyé sur la faveur de la cour et sur l’appréciation du public de la ville. D’une part, il revendique la qualité et l’originalité de sa création théâtrale, n’hésitant pas à accuser sévèrement son rival de plagiat ; d’autre part, en rappelant le malheur qu’il a subi à la cour et les bienfaits que lui témoignait la famille de son dédicataire, il exprime son désir de retrouver un protecteur puissant.

Texte

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À Monsieur de Mancini, colonel de la Cavalerie française3

{NP 1} Monsieur,

Si vous regardez ce petit ouvrage du même œil que vous et toute votre illustre maison avez regardé son auteur, quoiqu’il ait été achevé dans sa disgrâce, et qu’il ait eu quelque part à sa mauvaise fortune4, je ne doute point qu’il ne soit encore reçu dans le monde avec honneur, sous une protection aussi favorable et aussi glorieuse que la vôtre, et que l’auteur et l’ou-{NP 2}[vr]age5 n’y soient encore considérés avec quelque [pl]aisir sous ce même titre des « Heureux infortu[n]és »6. Je ne sais, Monsieur, si j’aurai aussi [h]eureusement travaillé7 à rectifier la disposition de ce sujet espagnol8 que l’on s’est imaginé de m’avoir dérobée9 , que vous avez généreusement agi pour rétablir ma réputation que l’on avait aussi songé à me dérober et que l’on avait défigurée aussi misérablement que mon ouvrage. J’ai du moins cette consolation d’apprendre de tous côtés que ceux qui passent sans contredit dans le monde pour être les esprits les plus éclairés du siècle, après avoir vu les deux représentations sur deux différents théâtres10, n’ont pu même demeurer d’accord que l’on m’eût ôté la grâce de la nouveauté, tant ils ont trouvé que l’on m’avait imité de mauvaise grâce11. Enfin Monsieur, quand12 il serait vrai que j’aurais passé de bien loin ces mauvais imitateurs, supposé même que j’eusse fait un chef-d’œuvre, et qu’avec ce chef-d’œuvre j’eusse fait dessein de vous consacrer tout ce qui sortira jamais de ma plume, il faut que je confesse qu’après les avantages que j’ai reçus de votre glorieuse protection, je ne vous puis jamais faire qu’un mauvais présent, ni vous témoigner que de faibles reconnaissances. La Cour n’a pu voir sans admiration la vigueur avec laquelle vous m’avez osé soutenir dans une oppression que mes seuls malheurs avaient fait naître ; Madame {NP 3} votre généreuse mère13 a bien fait voir en secondant vos bonnes intentions que sa haute et inébranlable vertu portait les vrais caractères de celles de la vieille Rome ; vos illustres sœurs14 ont cru qu’à son exemple elles me devaient protéger, dès le moment que leurs yeux aussi clairvoyants qu’ils sont beaux ont daigné pénétrer jusque dans la source de ma disgrâce. Lorsqu’elles ont vu que mes amis s’étonnaient15 parmi tant d’intrigues bizarres16 et de conjonctures délicates, c’est lors17 qu’elles ont montré plus de chaleur et de fermeté, parce qu’elles ont cru qu’il y avait de la gloire et de la justice à me défendre. Jugez donc, Monsieur, si, me voyant si glorieusement appuyé parmi mes malheurs, je n’ai pas dû me louer plutôt que me plaindre de cette disgrâce ; et jugez aussi, si, me présentant aujourd’hui devant vous avec tous les ressentiments18 d’un homme reconnaissant, je ne puis pas aussi bien prendre le titre d’ « heureux infortuné » que le héros que je vous présente. Je ne vous donne point ici en abrégé l’histoire de sa vie et de ses belles actions pour vous apprendre à devenir vertueux : outre que vous avez des exemples domestiques que vous estimez plus solides et que vous croyez plus véritables, vous sentez bien que vous avez en vous-même des sources d’honneur et de gloire qui, sans autre secours que celui de la nature, vous mènent à la vertu. À quatorze {NP 4} ans, nous vous avons vu essuyer tous les périls d’une première campagne, avec autant de courage et de fermeté, mais avec plus de fortune que ce brave frère19 que la France pleure encore, et que nous regretterons à jamais. Puisque la mort qui nous l’ôte s’est contentée de vous menacer, et que vous avez été quitte de ce premier coup pour une légère contusion à la tête, il y a lieu d’espérer que vous jouirez tout seul des victoires et des triomphes que les astres promettaient à ce jeune héros, s’il eût évité ce coup fatal par qui nous vîmes abattre une des plus belles vies du monde. Je ne demande plus, Monsieur, en l’âge où je suis20, qu’autant de vie qu’il m’en faut pour être témoin des secondes merveilles que nous avons sujet d’attendre de votre courage ; cependant comme je vois croître de moment en moment avec beaucoup de justice la prospérité de votre maison, ne pouvant vous donner que des vœux et des souhaits impuissants pour les faveurs et les grâces que j’ai reçues, je me console au moins de vous voir assez généreux pour les recevoir d’aussi bon cœur que si j’étais avec des effets solides21,

Monsieur,

Votre très-humble et très obéissant serviteur,

Bois-Robert, Abbé de Châtillon.