IdT – Les idées du théâtre


 

Dédicace

Le Charme de la voix

Corneille, Thomas        .

Éditeur scientifique : Pavesio, Monica

Description

Auteur du paratexteCorneille, Thomas        .

Auteur de la pièceCorneille, Thomas

Titre de la pièceLe Charme de la voix

Titre du paratexteSans titre

Genre du texteDédicace

Genre de la pièceComédie

Date1658

LangueFrançais

ÉditionImprimé à Rouen, L. Maurry / Paris, A. Courbé, G. de Luyne, 1658, in-12°. (Numérisation en cours)

Éditeur scientifiquePavesio, Monica

Nombre de pages3

Adresse source

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Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/ThomasCorneille-CharmeVoix-Dedicace.odt

Mise à jour2014-11-27

Mots-clés

Mots-clés français

SourcesLo que puede la aprensión (Ce que peut l’impression) d’Augustin Moreto

SujetSujet adapté

Personnage(s)Princesses et souverains ; valets et bouffons

ReprésentationÉchec

ActualitéGoût espagnol hors mode

Mots-clés italiens

FontiLo que puede la aprensión d’Augustin Moreto

ArgomentoArgomento adattato

Personaggio(i)Principesse e sovrani ; servi e buffoni

RappresentazioneInsuccesso

AttualitàI soggetti spagnoli ormai fuori moda

Mots-clés espagnols

FuentesLo que puede la aprensión de Agustín Moreto

TemaSujeto adaptado

Personaje(s)Princesas y soberanos ; criados y bufones

RepresentaciónFracaso

ActualidadGusto español pasado de moda

Présentation

Présentation en français

La comédie Le Charme de la voix est la neuvième pièce de Thomas Corneille. Elle fut probablement représentée au début de 16571 et fut publiée en 1658 à Rouen chez L. Maurry, comme bon nombre de pièces des frères Corneille. La comédie, comme le rappelle l’épître, s’inspire directement d’une comedia espagnole de Moreto. Dans ce texte liminaire, l’auteur donne son jugement sur l’échec de sa pièce. Il prend en compte l’opinion du public qui a décrété l’insuccès de sa comédie et cherche à comprendre les raisons de cet échec en France d’une pièce qui fut un succès en Espagne. Il souligne que la faute ne lui revient pas, mais qu’il faut l’imputer à son modèle espagnol. Il rappelle à son destinataire anonyme le processus de son adaptation, ses doutes et ses réticences initiales quant à la possibilité d’adapter au théâtre français un sujet espagnol. Ce fut finalement sous l’insistance d’un ami et du dédicataire qu’il se résolut à écrire cette adaptation, mais son échec montre que les goûts de l’Espagne et de la France sont désormais trop différents. Après le succès de Timocrate, Le Charme de la voix déçut probablement les attentes d’un public plus désireux, en 1657, d’une tragédie galante que d’une comédie « à l’espagnole ». Il faut en effet souligner avec G. Le Chevalier2 que Le Charme de la voix n’est pas une mauvaise pièce mais qu’elle fut représentée à une époque où le public attendait autre chose de l’auteur de Timocrate.

Texte

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Monsieur3,

{NP1} Je n’appellerai point du jugement du public sur cette comédie, pour tâcher à vous faire estimer davantage le présent que je vous en fais. Il peut se laisser surprendre dans les approbations qu’il donne, et ces tumultueux applaudissements qu’une première émotion lui fait quelquefois accorder d’abord à ce qu’il n’a pas bien examiné ne sont pas toujours d’infaillibles garants de la véritable beauté de nos poèmes ; mais il arrive rarement qu’il condamne ce qui mérite d’être approuvé4, et puisqu’il s’est déclaré contre celui-ci, je dois être persuadé qu’il a eu raison de le faire5. On m’accusera sans doute d’une franchise peu judicieuse d’en demeurer d’accord avec vous, lorsque je prends la liberté de vous l’offrir, et j’aurais lieu d’appréhender que vous n’entrassiez dans ce sentiment, si je n’étais assuré que vous ne m’imputerez pas ce qu’il a de plus défectueux, et que séparant ce que vous y connaîtrez de moi d’avec ce qui n’en est pas, vous serez assez équitable pour trouver de l’injustice à me vouloir faire répondre des fautes d’autrui6. J’ai rendu si religieusement jusqu’ici ce que j’ai cru devoir aux {NP2} auteurs espagnols qui m’ont servi de guides dans les sujets comiques qui ont paru de moi sur la scène avec quelque succès7, qu’on ne doit pas trouver étrange si, leur en ayant fait partager la gloire, je refuse de me charger de toute la honte qui a suivi le malheur de ce dernier, puisqu’en effet j’eusse peut-être moins failli si je ne me fusse pas attaché si étroitement à la conduite de D. Augustin Moreto, qui l’a traité dans sa langue sous le titre de Lo que puede la apprehension8 [sic]. Si vous voulez vous souvenir de la lecture que nous fîmes ensemble de cet original, avant que j’en commençasse la copie, vous vous souviendrez en même temps que j’en combattis opiniâtrement tous les caractères et soutins que, quelque soin que l’on apportât à les justifier pour le faire paraître avec quelque grâce sur notre théâtre, il serait impossible d’en venir à bout sans faire voir toujours ceux qui sont intéressés dans cette intrigue9 plus capricieux que raisonnables ; néanmoins cet excellent ami qui me portait à ce dessein appuya si fortement devant vous le conseil qu’il m’avait déjà donné d’y travailler, que vous vous en laissâtes vous-même persuader et crûtes que, puisque la bizarrerie10 des motifs qui font agir tous les personnages de cette comédie avait été reçue en Espagne avec acclamation, il y avait lieu d’espérer que, pour peu que j’employasse d’adresse à les rendre plus justes11, ils ne déplairaient pas en France. Il n’en {NP3} fallut point davantage pour me forcer à me rendre ; je ne voulus plus opposer que le goût des deux nations est fort différent, que ces entretiens de valets et de bouffons avec des princesses et des souverains, que l’une12 souffre toujours avec plaisir dans les actions les plus sérieuses, ne sont jamais supportables à l’autre13 dans les moins importantes14, et que les plus ingénieuses nouveautés deviennent rarement capables de nous divertir quand elles semblent en quelque sorte opposées à la raison15. L’événement a fait voir que je n’en avait pas mal jugé. Je ne saurais toutefois me repentir entièrement de m’être exposé à cette petite disgrâce contre mes sentiments, puisqu’elle vous doit convaincre de la déférence que j’ai pour les vôtres et de la passion avec laquelle je suis,

Monsieur,

votre très humble serviteur,

T. Corneille