Préface
Le Thyeste
Monléon
Éditeur scientifique : Mercier, Lynda
Description
Auteur du paratexteMonléon
Auteur de la pièceMonléon
Titre de la pièceLe Thyeste
Titre du paratexteAu Lecteur
Genre du textePréface
Genre de la pièceTragédie
Date1638
LangueFrançais
ÉditionParis, Pierre Guillemot, 1638, in-4°.
Éditeur scientifiqueMercier, Lynda
Nombre de pages2
Adresse sourcehttp://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71384b/f2
Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/Monleon-Thyeste-Preface.xml
Fichier HTMLhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/html/Monleon-Thyeste-Preface.html
Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/Monleon-Thyeste-Preface.odt
Mise à jour2015-05-24
Mots-clés
Mots-clés français
GenreTragédie
SourcesSénèque
SujetHorreur ; peu de matière ; habillage à la française ; disposition moderne
DramaturgieRespect des règles
AutreAnciens (respect / affranchissement)
Mots-clés italiens
GenereTragedia
FontiSeneca
ArgomentoOrrore ; poca materia ; adattata al gusto francese ; disposizione moderna
DrammaturgiaRispetto delle regole
AltriAntichi (rispetto / trasgressione)
Mots-clés espagnols
GéneroTragedia
FuentesSéneca
TemaHorror ; poca materia ; tragedia a la francesa ; disposición moderna
DramaturgiaRespeto de las reglas
OtrasAntiguos (respeto / ruptura)
Présentation
Présentation en français
Texte
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Au Lecteur
[NP1] Si je t’avais donné cette tragédie de la façon que Carcinome, ou Sénèque1 l’ont traitée, peut-être, lecteur, y aurais-tu trouvé plus d’agréments, et peut-être aussi l’aurais-tu estimée trop nue pour le théâtre d’aujourd’hui2. Les Grecs et les Latins ont fait à la grecque, et à la romaine, ce que je fais à la française, et comme les esprits de ce temps embrassent davantage3, il a fallu aussi de quoi davantage les contenter : j’ai tâché à le faire, non pas sans beaucoup de peine et de sueur, par l’entreprise d’un ouvrage où plusieurs se sont lassés4; et le peu de matière, et l’horreur du sujet ayant arrêté leur plume, m’ont fait prendre la mienne à dessein de rendre supportable aux yeux, et aux cœurs des moins cruels de la Nature, ce que la Nature même abhorre, et ce qu’on n’aurait jamais pu croire s’il n’était arrivé dans la race de Tantale.
On m’a voulu persuader que cet effort avait favorablement réussi5 : mais quand je considère mes forces, et le grand personnage6 qu’il m’a fallu soutenir, soit dans la disposition de l’histoire, dans les pensées, ou dans les raisonnements, une frayeur me saisit ; je rends les armes premier que de7 combattre ; et si l’on tient pour fabuleux ce qu’Homère assure de ces dieux qui combattaient pour [NP2] les hommes8, je n’ai pas de quoi soutenir leur opinion, et ma vanité ne m’aveugle pas jusques au point de les croire.
Quoi qu’il en soit, lecteur, et quelque jugement que tu en fasses, apprends que la disposition du sujet est absolument mienne, et que j’ai élevé sur le fondement de l’histoire et de l’Antiquité un ouvrage à la moderne. Les enrichissements que j’ai rencontrés parmi leurs matériaux en font l’embellissement9 ; et bien que je me sois rendu plus prodigue qu’eux à m’étendre, pour contenter les esprits de ce siècle, je n’ai pas toutefois voulu sortir de leurs étroites règles qui me semblent si judicieuses10, et si parfaites ; que sans elles, (quoiqu’au jugement de plusieurs, il s’en rencontre tous les jours) j’ai de la peine à croire qu’aucun poème puisse être agréable11. Regarde donc si j’aurai péché contre mon dessein ; montre-moi charitablement mes défauts, alors tu reconnaîtras par mes actions, de grâce, et de combien je te serai obligé, et combien me sera douce cette correction. Je laisse dans leurs faiblesses, et leurs bigearreries12 ceux qui s’estiment parfaits, leurs cerveaux ont besoin d’hellébore13, et tels esprits sont plus dignes de blâme que de louange : quand on présume moins de soi, on mérite davantage, et par la seule humilité nous nous élevons au trône de la gloire.
Parle donc hardiment, je suis exempt de cette erreur, et de ce crime, et pour t’en assurer, je sais que je suis homme.