IdT – Les idées du théâtre


 

Préface

Le Théâtre de Jaques Grévin, de Clermont en Beauvaisis

Grévin, Jacques

Éditeur scientifique : Lardon, Sabine

Description

Auteur du paratexteGrévin, Jacques

Auteur de la pièceGrévin, Jacques

Titre de la pièceLe Théâtre de Jaques Grévin, de Clermont en Beauvaisis

Titre du paratexteAu Lecteur

Genre du textePréface

Genre de la pièceComédie

Date1561

LangueFrançais

ÉditionLe Théâtre de Jacques Grévin, de Clermont en Beauvaisis, Paris, Vincent Sertenas, 1562, in-8°. (Numérisation en cours)

Éditeur scientifiqueLardon, Sabine

Nombre de pages3

Adresse source

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Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/Grevin-Theatre-Preface2.odt

Mise à jour2015-01-27

Mots-clés

Mots-clés français

GenreComédie

SourcesAristophane ; Plaute ; Térence

SujetVérité et naïveté de la langue ; mœurs et conditions des gens du peuple

Personnage(s)Marchand ; serviteur ; chambrière

FinalitéReprésenter les mœurs et conditions des gens du peuple

ExpressionVérité et naïveté de la langue ; mots grossiers, sentences, manière de parler vulgaire ; ne pas farder ni orner la langue ; convenance du langage avec les personnages

Mots-clés italiens

GenereCommedia

FontiAristofane ; Plauto ; Terenzio

ArgomentoVerità e ingenuità della lingua ; costumi e condizioni della gente del popolo

Personaggio(i)Mercante ; servo ; cameriera

FinalitàRappresentare i costumi e le condizioni della gente del popolo

EspressioneVerità e ingenuità della lingua ; parole sconcie, sentenze, modo di parlare volgare ; non abbellire né ornare la lingua ; adattamento del linguaggio con i personaggi

Mots-clés espagnols

GéneroComedia

FuentesAristófanes ; Plauto ; Terencio

TemaVerdad e ingenuidad de la lengua ; costumbres y condiciones de la gente del pueblo

Personaje(s)Mercader ; criado ; camarera

FinalidadRepresentar las costumbres y condiciones de la gente del pueblo

ExpresiónVerdad e ingenuidad de la lengua ; palabras groseras, sentencias, manera de hablar vulgar ; no afeitar ni adornar la lengua ; adecuación del lenguaje con los personajes

Présentation

Présentation en français

Quand il rassemble ses pièces dans une édition de son Théâtre, Jacques Grévin les fait précéder d’un « Bref discours pour l’intelligence de ce théâtre »1, dans lequel il rappelle les principes de la tragédie et de la comédie. Viennent ensuite sa tragédie César, puis ses deux comédies : La Trésorière et Les Ébahis. Si ces dernières sont chacune pourvues d’un paratexte propre2, un bref avis « Au Lecteur » commun les précède néanmoins. L’auteur s’y inscrit explicitement dans la continuité d’Aristophane, de Plaute et de Térence, afin de revendiquer « la liberté des poètes comiques » d’user de manières de parler grossières et populaires. Habilement, il parvient à retourner la critique que l’on pourrait émettre contre ce choix de registre. Refusant « d’orner » et de « farder » son propos, il prétend « seulement de donner aux Français la comédie en telle pureté qu’anciennement l’ont baillée Aristophane aux Grecs, Plaute et Térence aux Romains ». La pureté, la naïveté sont donc de son côté. À l’inverse, il dénonce le ridicule de ceux qui ont recours au latin pour « déguiser » le français et le couvrir « des plumes d’autrui ». Incidemment, Grévin s’appuie donc sur la notion horacienne fondamentale de convenance pour défendre et justifier son choix : la comédie traite de personnages bas, marchands, serviteurs et chambrières, et doit donc leur faire parler un langage adéquat (en excluant toutefois les régionalismes) : « le comique se propose de représenter la vérité et naïveté de sa langue, comme les mœurs, les conditions et les états de ceux qu’il met en jeu ». Faire parler « un cuisinier des choses célestes et descriptions des temps et des saisons, ou bien une simple chambrière française des amours de Jupiter avec Léda et des vaillantises d’Alexandre le grand » serait d’une inconvenance qui confinerait au grotesque. Grévin termine en évoquant sa première comédie, qui aurait été volée, La Maubertine, et en rappelant surtout qu’il est parmi les premiers à explorer cette voie nouvelle de la comédie à l’antique.

Texte

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Au Lecteur        

{43 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71938t/f69.image} La liberté des poètes comiques a toujours été telle que, souventesfois3, ils ont usé de mots assez grossiers, de sentences et manières de parler rejetées de la boutique4 des mieux disants ou de ceux qui pensent mieux dire5 ; ce que paraventure6 l’on pourra trouver lisant mes comédies7. Mais pourtant, il ne se faut renfrogner, car il n’est pas ici question de farder la langue d’un mercadant8, d’un serviteur ou d’une chambrière, et moins orner9 le langage du vulgaire, lequel a plutôt dit un mot que pensé10. Seulement le comique se propose de représenter la vérité et naïveté de sa langue, comme les mœurs, les conditions et les états de ceux qu’il met en jeu, sans toutefois faire tort à sa pureté, laquelle est plutôt entre le vulgaire (je dis si l’on change quelques mots qui ressentent leur terroir11) qu’entre ces courtisans qui pensent avoir fait un beau coup quand ils ont arraché la peau de quelque {44 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71938t/f70.image} mot latin pour déguiser le français, qui n’a aucune grâce, disent-ils, s’il ne donne à songer aux femmes, comme s’ils prenaient plaisir de n’être point entendus12. Tu ne trouveras donc étrange, Lecteur, si en ces comédies tu ne trouves un langage recherché curieusement13 et enrichi des plumes d’autrui, car je ne suis point de ceux qui font parler un cuisinier des choses célestes et descriptions des temps et des saisons, ou bien une simple chambrière française des amours de Jupiter avec Léda et des vaillantises d’Alexandre le grand14. Je me contente seulement de donner aux Français la comédie en telle pureté qu’anciennement l’ont baillée Aristophane aux Grecs, Plaute et Térence aux Romains. Ce que je me suis proposé toujours en écrivant ce poème, ainsi qu’ont pu apercevoir ceux qui ont vu La Maubertine, première comédie que je mis en jeu, et que j’avais bien délibéré te donner si elle ne m’eût été dérobée15. Toutefois celles-ci pourront suffire pour mon{45 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k71938t/f71.image}trer le chemin à ceux qui viendront après nous. Tu peux donc maintenant, ami Lecteur, averti de ce point, te mettre à lire ce poème, et si tu trouves quelque chose qui ne soit à ton goût, souvienne-toi16 que ce n’est chose étrange si ceux qui sont les premiers en un désert et pays inconnu se fourvoient souventesfois en leur chemin17.