IdT – Les idées du théâtre


 

Dédicace

Téléphonte. Tragi-comédie. Représenté par les deux Troupes Royales

Gilbert, Gabriel

Éditeur scientifique : Blondet, Sandrine

Description

Auteur du paratexteGilbert, Gabriel

Auteur de la pièceGilbert, Gabriel

Titre de la pièceTéléphonte. Tragi-comédie. Représenté par les deux Troupes Royales

Titre du paratexteÀ Madame[,] Madame la duchesse d’Aiguillon

Genre du texteDédicace

Genre de la pièceTragi-comédie

Date1643

LangueFrançais

ÉditionParis, Toussaint Quinet, 1643, in-4°

Éditeur scientifiqueBlondet, Sandrine

Nombre de pages3

Adresse sourcehttp://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5448678k

Fichier TEIhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/tei/Gilbert-Telephonte-Dedicace.xml

Fichier HTMLhttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/html/Gilbert-Telephonte-Dedicace.html

Fichier ODThttp://www.idt.paris-sorbonne.fr/odt/Gilbert-Telephonte-Dedicace.odt

Mise à jour2013-06-05

Mots-clés

Mots-clés français

SourcesHistoire ancienne

Personnage(s)Mérope et Philoclée

DédicatairePerfection des héroïnes et de la duchesse ; supériorité de la dédicataire

ReprésentationReprésentation à la cour

RéceptionSuccès

ExpressionIdéal d’une richesse de la forme conforme à celle de la matière

AutreÉloge (implicite) de Richelieu

Mots-clés italiens

FontiStoria antica

Personaggio(i)Merope e Filoclea

Dedicatario e PersonaggioPerfezione delle eroine e della duchessa ; superiorità della dedicataria

RappresentazioneRappresentazione in corte

RicezioneSuccesso

EspressioneIdeale d’una richezza della forma conforme a quella della materia

AltriElogio (implicito) di Richelieu

Mots-clés espagnols

FuentesHistoria antigua

Personaje(s)Merope y Filoclea

Dedicatario y personajePerfección de las heroínas y de la duquesa ; superioridad de la dedicataria

RepresentaciónRepresentación en la corte

RecepciónÉxito

ExpresiónIdeal de una riqueza de la forma conforme a la riqueza de la materia

OtrasElogio (implícito) de Richelieu

Présentation

Présentation en français

La deuxième pièce de Gilbert est dédiée, comme la première, à la duchesse d’Aiguillon1. Si celle-ci avait déjà commandé Marguerite de France, la dédicace de Téléphonte rappelle qu’elle avait de même organisé la représentation de cette deuxième tragi-comédie lors d’« une assemblée solennelle », et par les deux troupes parisiennes réunies, circonstance suffisamment exceptionnelle pour être fièrement mentionnée sur la page de titre de l’édition originale2.

La dédicace épouse ici le parcours et le ton panégyrique adoptés deux ans auparavant lors de la publication de Marguerite de France3. L’auteur commence par remercier sa dédicataire de l’estime publique qu’elle a manifestée à la pièce, ce qui lui permet tout naturellement de saluer la perfection de son jugement et la déférence que lui témoignent « toutes les personnes judicieuses ». S’ensuit l’éloge de Téléphonte, à peine atténué par des protestations réitérées de modestie. Vient enfin l’assimilation des héroïnes et de la duchesse – Gilbert ne fait pas mention de Téléphonte, héros pourtant éponyme4 –, occasion de proclamer la supériorité de celle-ci sur ces illustres figures antiques, soulignée par la traditionnelle prétérition destinée à proclamer l’impuissance de l’auteur à l’exprimer.

Texte

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À Madame

Madame la duchesse d’Aiguillon

Madame,

[NP1] Quoique je doutasse du succès de cette pièce, si tôt que j’appris que vous l’aviez choisie pour une assemblée solennelle, je commençai d’en espérer beaucoup. Je crus qu’elle emprunterait un grand éclat de votre présence, et que sa destinée serait heureuse, puisque vous preniez le soin de la faire. Je ne fus point trompé dans mon attente, et l’estime que vous en fîtes fut suivie de celle de toutes les personnes judicieuses ; elles défèrent tant à votre jugement , qu’elles croient que [NP2] leur opinion n’est jamais si saine que lorsqu’elle est conforme à la vôtre. Ainsi, Madame, en pensant me donner une approbation particulière, vous m’en avez donné une générale. Mais je suis contraint d’avouer que mon ouvrage doit tout son lustre à vos louanges, et non pas à son mérite, et que la réputation qu’il a eue est plutôt une marque de votre faveur qu’une preuve de mon esprit. Il est vrai, Madame, que cette pièce n’est pas entièrement défectueuse, qu’elle a quelque chose non seulement de beau, mais aussi d’éclatant, et que si la richesse de la forme eût répondu à celle de la matière, elle aurait pu passer pour un chef-d’œuvre. On dit qu’un des plus fameux poètes de l’Antiquité a travaillé autrefois sur ce sujet, et le plus savant des philosophes en parle comme d’un exemple de perfection5. Mais cette tragédie n’est point parvenue jusques à nous, et le temps qui ne respecte pas les plus beaux ouvrages nous a ravi celui-ci. Il nous en est pourtant resté quelque chose, et l’Histoire ancienne qui en a conservé la meilleure partie m’a fourni la matière de ce poème. C’est elle, Madame, que vous avez admirée, et non pas la faiblesse de mes pensées, et par une grâce particulière, vous n’avez pas voulu distinguer l’un de l’autre, ni séparer mes défauts des vertus d’autrui. Vous n’avez pas voulu parler de la rudesse de mon style, mais de la beauté de l’invention, et ce ne sont pas mes vers que vous avez loués, mais le courage de Mérope et la constance de Philoclée. Vous ne seriez pas équitable comme vous êtes, Madame, si vous n’eussiez hautement loué ces deux grandes princesses, puisque toutes leurs actions ne sont qu’un portrait de votre vie héroïque. Les vertus qui brillaient autrefois en elles reluisent maintenant en vous ; comme elles vous les faites éclater en tous lieux, et comme elles, vous trouvez dans [NP3] votre race un héros qui, comme un autre Téléphonte, est l’ornement de son siècle et la gloire de sa patrie6. Quelque accomplies que soient ces deux illustres Grecques, il faut toutefois qu’elles vous cèdent7, et vos vertus sont autant au-dessus des leurs que les vertus chrétiennes sont au-dessus des vertus morales. J’ai parlé de leurs perfections, mais je ne suis pas capable de parler des vôtres. Elles jettent une si grande lumière qu’elle m’éblouit. Mais en m’empêchant de les contempler, elle ne m’empêche pourtant pas de les connaître. Je me dois arrêter à cette connaissance, sans en discourir, et sans entreprendre une chose qui serait au-dessus de mes forces. J’aime mieux faire voir mon respect par mon silence que mon insuffisance par mes paroles. Et afin de ne passer pas pour un ingrat après les grâces dont je vous suis redevable, j’ai voulu seulement vous faire paraître le ressentiment8 que j’en ai, et combien je m’estime heureux de ce que ce même ouvrage qui vous a donné occasion de me témoigner votre bonté me donne aussi le moyen de la publier partout, et de me dire,

Madame,

Votre très humble et très obéissant serviteur. G. G.