IdT – Les idées du théâtre


 

Préface

Don Sanche d’Aragon

Corneille, Pierre

Éditeur scientifique : Vuillermoz, Marc

Description

Auteur du paratexteCorneille, Pierre

Auteur de la pièceCorneille, Pierre

Titre de la pièceDon Sanche d’Aragon

Titre du paratexteExamen

Genre du textePréface

Genre de la pièceComédie héroïque

Date1660

Languefrançais

ÉditionLe Théâtre de P. Corneille, revu et corrigé par l’auteur (IIIe partie), Paris: Augustin Courbé et Guillaume de Luyne, 1660, in-8°

Éditeur scientifiqueVuillermoz, Marc

Nombre de pages3

Adresse source

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Mise à jour2016-05-10

Mots-clés

Mots-clés français

DramaturgieReconnaissance ; entrée des personnages

TempsCoïncidence entre le temps de la fiction et celui de la représentation

RéceptionMitigée

Mots-clés italiens

DrammaturgiaAgnizione ; entrata in scena

TempoCoincidenza tra il tempo della finzione e quello della rappresentazione

RicezioneAmbivalente

Mots-clés espagnols

DramaturgiaAnagnórisis ; salidas de los personajes

TiempoAdecuación entre tiempo de la ficción y tiempo de la representación

RecepciónÉxito moderado

Présentation

Présentation en français

Bien moins riche en réflexions sur l’écriture théâtrale que l’autre paratexte accompagnant la pièce (l’épître à M. de Zuylichem), cet examen rassemble quelques remarques isolées d’ordre dramaturgique. Après avoir mentionné très brièvement les sources de sa comédie et fait état de la réception contrastée que celle-ci a connue auprès du public, Corneille examine essentiellement la question du sujet et de sa mise en intrigue ainsi que celle des personnages.

Texte

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EXAMEN

{lxxj}Cette pièce est toute d’invention, mais elle n’est pas toute de la mienne. Ce qu’a de fastueux le premier acte est tiré d’une comédie espagnole intitulée El Palacio confuso1, et la double reconnaissance qui finit le cinquième2 est prise du roman de Don Pélage3. Elle eut d’abord grand éclat sur le théâtre, mais une disgrâce particulière fit avorter toute sa bonne fortune. Le refus d’un illustre suffrage4 dissipa les applaudissements que le public lui avait donnés trop libéralement, et anéantit si bien tous les arrêts que Paris et le reste de la Cour avaient prononcés en sa faveur, qu’au bout de quelque temps, elle se trouva reléguée dans les Provinces, où elle conserve encore son premier lustre.

Le sujet n’a pas grand artifice. C’est un inconnu assez honnête homme pour se faire aimer de deux reines. L’inégalité des conditions met un obstacle au bien qu’elles lui veulent {lxxij}durant quatre actes et demi, et quand il faut de nécessité finir la pièce, un bonhomme5 semble tomber des nues pour faire développer le secret de sa naissance, qui le rend mari de l’une en le faisant reconnaître pour frère de l’autre6.

Haec eadem a summo expectes minimoque poeta.7

D. Raymond et ce pêcheur ne suivent point la règle que j’ai voulu établir, de n’introduire aucun acteur qui ne fût insinué dès le premier Acte8, ou appelé par quelqu’un de ceux qu’on y a connus. Il m’était aisé d’y faire dire à la Reine D. Léonor ce qu’elle dit à l’entrée du quatrième, mais si elle eût fait savoir qu’elle eût eu un fils et que le Roi, son mari, lui eût appris en mourant que D. Raymond avait un secret à lui révéler, on eût trop tôt deviné que Carlos était ce Prince. On peut dire de D. Raymond qu’il vient avec les députés d’Aragon, dont il est parlé au premier acte, et qu’ainsi il satisfait aucunement9 à cette règle, mais ce n’est que par hasard qu’il vient avec eux. C’était le pêcheur qu’il était allé chercher et non pas eux, et il ne les joint sur le chemin qu’à cause de ce qu’il a appris chez ce pêcheur, qui de son côté vient en Castille de son seul mouvement, sans y être amené par aucun incident dont on {lxxiij}ait parlé dans la protase10, et il n’a point de raison d’arriver ce jour-là plutôt qu’un autre, sinon que la pièce n’aurait pu finir s’il ne fût arrivé.

L’unité de jour y est si peu violentée qu’on peut soutenir que l’action ne demande pour sa durée que le temps de sa représentation11. Pour celle de lieu, j’ai déjà dit que je n’en parlerais plus sur les pièces qui restent à examiner en ce volume12. Les sentiments du second acte ont autant ou plus de délicatesse qu’aucuns que j’aie mis sur le théâtre. L’amour des deux reines pour Carlos y paraît très visible, malgré le soin et l’adresse que toutes les deux apportent à le cacher dans leurs différents caractères, dont l’un marque plus d’orgueil, et l’autre plus de tendresse. La confidence qu’y fait celle de Castille avec Blanche est assez ingénieuse, et par une réflexion sur ce qui s’est passé au premier acte, elle prend occasion de faire savoir aux spectateurs sa passion pour ce brave inconnu, qu’elle a si bien vengé du mépris qu’en ont fait les comtes13. Ainsi on ne peut dire qu’elle choisisse sans raison ce jour-là plutôt qu’un autre pour lui en confier le secret, puisqu’il paraît qu’elle le sait déjà, et qu’elles ne font que raisonner ensemble sur ce qu’on vient de voir représenter.